PNUD : La France souhaite un développement solidaire et durable

PNUD : La France souhaite un développement solidaire et
durable
Forum du Programme des Nations unies
pour le développement (PNUD) : allocution d'ouverture de M. Michel Barnier,
ministre français des Affaires étrangères.
Paris, 17 janvier 2005.
Source:
Quai d'Orsay.
Mesdames et Messieurs,
Très sincèrement, bienvenue à chacune et à chacun d'entre
vous, ici à Paris, dans ces locaux qui sont ceux de notre ministère, dans la
diversité de vos responsabilités, de vos engagements, de vos pays aussi ; nous
sommes très heureux et très fiers que vous ayez répondu à notre invitation.
Madame la Présidente, Monsieur l'Administrateur, Mesdames et Messieurs, je
voudrais en effet introduire ces journées de travail en vous remerciant pour
votre présence même, la qualité, la richesse des personnalités de tous horizons,
venues de cinq continents, qui d'ores et déjà permettent de donner à ces
journées, l'écho que nous voulons leur attribuer en participant à ces débats. Je
voudrais également saluer la présence de très nombreux représentants de la
société civile, les milieux académiques en particulier, cela vient d'être dit,
du professeur Amartya Sen, du secteur privé, des chercheurs, enseignants,
étudiants et de nombreux représentants de la presse.
Au tout début de ce propos, vous me permettrez de remercier l'équipe du
Programme des Nations unies pour le Développement d'avoir organisé, avec notre
pays, cet événement et de la remercier aussi pour le soutien qu'elle nous a
apporté.
Je voudrais également remercier nos principaux partenaires pour l'organisation
de ces journées, l'Institut des Relations internationales et du Développement
durable, la Fondation des Sciences politiques et le journal "Les Échos".
Mesdames et Messieurs, nos travaux, vos travaux, vont s'appuyer sur beaucoup de
rapports de grande qualité concernant le développement humain - rapports qui ont
depuis quinze ans - et c'est particulièrement le cas cette année sur un sujet
qui nous tient particulièrement à cœur, celui de la diversité culturelle,
contribué à enrichir les réflexions. Cela vient d'être dit, M. l'Administrateur
Marc Maloch-Brown vient d'être nommé à un poste très important, stratégique,
névralgique, celui de directeur de cabinet du Secrétaire général des Nations
unies, Kofi Annan, que nous saluons par votre intermédiaire au-delà de ces murs
et auquel nous redisons, comme le président de la République l'a fait à
plusieurs reprises ces temps derniers, le témoignage de soutien, d'amitié et de
confiance que nous lui manifestons.
Je voudrais, Monsieur l'Administrateur, vous féliciter et vous encourager pour
cette nouvelle mission importante. C'est d'ailleurs, pour nous, un signal très
clair que le Secrétaire général des Nations unies ait porté son choix sur une
personnalité qui exprime, qui personnalise l'importance des questions
économiques et de développement dans le monde d'aujourd'hui. Et cette
nomination, votre nomination, intervient à un moment en effet crucial pour
l'Organisation des Nations unies et donc pour notre communauté internationale.
2005 est une année très importante, elle s'ouvre sur des perspectives nouvelles
où nous voyons se mêler l'espérance, l'espoir, mais aussi la tragédie. Comment
ne pas penser à cette tragédie mondiale, mondialisée, planétaire du 26 décembre
en Asie, par l'ampleur, le nombre de victimes de pays pauvres - et on sait bien
que de telles tragédies sont encore plus tragiques dans les pays pauvres ? Tous
les pays du monde entier ont été plus ou moins touchés et tout cela nous
rappelle simplement notre vulnérabilité et, en même temps, notre solidarité.
Quand elle n'est pas voulue, assumée, choisie, elle est imposée, on l'a vu avec
cette crise. Je souhaite dire ici, à plusieurs d'entre vous qui représentez des
pays touchés directement par cette catastrophe, par leur territoire, par leur
peuple, notre sympathie, notre détermination aussi à accompagner la
reconstruction aujourd'hui nécessaire. Une reconstruction qui doit être une
reconstruction durable.
En septembre 2000, notre communauté internationale, nous tous, avons pris un
certain nombre d'engagements très forts. Nous nous sommes fixés huit objectifs
de développement dont le plus important est de réduire de moitié le nombre de
personnes touchées par la pauvreté à l'horizon de 2015. Nous nous sommes
également engagés à mener les réformes nécessaires pour être plus efficaces sur
le plan multilatéral. Nous voilà maintenant à un tiers du parcours, d'ici 2015.
C'est donc l'occasion franche, urgente, normale de faire un premier bilan des
progrès accomplis et peut-être de prendre de nouvelles dispositions pour tenir
ces engagements.
L'équipe du professeur Sachs remet cet après-midi son rapport au Secrétaire
général des Nations unies. C'est une étape importante qui montre combien les
Nations unies sont au cœur du dispositif du développement et combien leur rôle
est et restera irremplaçable dans la définition, dans la mise en œuvre des
différentes politiques et des différentes stratégies. Or, nous le savons - j'ai
évoqué le devoir de franchise - la plupart des études indiquent qu'au rythme
actuel les objectifs humanitaires pour le développement ne seront pas atteints,
en particulier en Afrique sub-saharienne. Voilà pourquoi aujourd'hui, et à
partir de maintenant, nous devons réagir. Tous les acteurs, gouvernements,
entreprises privées, associations locales, ONG, associations régionales aussi,
chercheurs, praticiens, du Nord comme du Sud, doivent donc se mobiliser pour
aller plus loin, pour faire plus, pour accroître leurs efforts, pour provoquer
un élan nouveau en faveur du développement.
Nous savons bien, tous ici dans nos différentes responsabilités, que l'aide au
développement n'est pas un phénomène de mode dont le pendant serait la vertu de
l'initiative privée aux effets immédiats et automatiques. C'est, au contraire,
un effort de long terme qui doit aller de pair avec l'action des opérateurs
économiques et bien sûr, contribuer à la faciliter.
Ce forum va donc être l'occasion de partager les expériences de chacun,
d'échanger, de mutualiser nos expériences et nos réflexions et aussi de faire
des propositions, en particulier dans la perspective du sommet sur le suivi de
la Déclaration du millénaire, au mois de septembre prochain à New York. La
France et le PNUD partagent une vision commune du développement fondée non
seulement sur la croissance des revenus mais aussi sur l'amélioration des
conditions de vie, en particulier l'accès à l'éducation et au service de la
santé, sur l'égalité des chances dans le respect des différences culturelles.
Je souhaite que les débats permettent de nourrir cette vision et envisage des
propositions dans ce sens. La France, vous le savez, ne se satisfait pas de la
situation actuelle ; nous avons donc une volonté clairement constructive. A la
demande du président de la République, Jacques Chirac, la France a ainsi accru
en 2005 ses contributions aux organisations des Nations unies de près de 40 %.
C'est un effort, inégalé dans le passé, mais qui vient corriger une tendance qui
n'était pas compatible avec l'engagement et les discours de mon pays sur ces
sujets majeurs. Et cet effort sera poursuivi au cours des prochaines années.
Au-delà, la France propose également un certain nombre d'initiatives dans
plusieurs domaines, et d'abord pour le financement du développement. Au-delà des
engagements que nous tiendrons, en termes d'aide publique au développement, des
ressources supplémentaires nous semblent indispensables. Nous avons proposé,
vous le savez, que soient mises en place de nouvelles contributions
internationales, volontaires ou obligatoires, dont les recettes bénéficieront au
développement. Nous avons été, dans ce sens, encouragés par le succès, l'écho
rencontré par la Déclaration de New York sur l'action contre la faim et la
pauvreté adoptée le 20 septembre dernier sur la proposition du président de la
République française, Jacques Chirac, mais également du président Lula, du
président Lagos et du Premier ministre Zapatero.
Je voudrais rappeler un passage de cette déclaration : "En complément de la
nécessité d'accroître, d'améliorer le niveau de l'aide, nous avons - disent
ces 110 chefs d'Etat et de gouvernement - également reconnu que le moment
était venu d'accorder davantage d'attention au mécanisme de financement
innovant, public ou privé, obligatoire ou volontaire, fondé ou non sur une
adhésion universelle, afin de lever les fonds rapidement nécessaires pour
contribuer à la réalisation des Objectifs de développement du Millénaire".
Le président de la République a précisé que, du point de vue de notre pays, une
taxation dont l'assiette reste naturellement à définir, devrait être prélevée au
bénéfice de la lutte contre le sida. Le rapport du groupe quadripartite publié
le 20 septembre dernier, ainsi que les options proposées par le groupe Landau -
et c'est l'occasion pour moi de remercier celles et ceux qui ont participé à ce
travail - sont de bonnes bases de travail. Nous nous efforçons désormais de
préciser les options réalisables, réalistes, rapidement en recherchant à
construire le plus large consensus possible autour de ces idées.
Nous proposons également, Mesdames et Messieurs, de renforcer les instances de
gouvernance internationale de l'environnement pour aboutir à la création d'une
Organisation des Nations unies pour l'environnement, qui prolongera, qui
amplifiera, qui consolidera l'expérience acquise avec le Programme des Nations
unies pour l'environnement. C'est précisément le sens de la réunion que j'ai
moi-même organisée à New York au mois de septembre et à laquelle ont participé
beaucoup de ministres des Affaires étrangères d'autres pays qui ont répondu à
cette invitation en marge de la dernière Assemblée générale des Nations unies.
Et, vous le savez, s'agissant de l'environnement, j'ai personnellement un vieil
engagement sur ce sujet. J'ai été ministre de l'Environnement et je considère ?
je l'ai d'ailleurs dit à l'ensemble des ambassadeurs français que je réunissais
ici même au mois d'août - que le défi d'une écologie humaniste, durable et
concrète serait la priorité de l'action extérieure de mon pays.
Nous souhaitons également - au-delà de cette initiative devant aboutir, si nous
trouvons le consensus nécessaire aux Nations unies, à cette organisation pour
l'environnement - le renforcement et l'amélioration de la gouvernance mondiale
en matière économique. Nous espérons que le débat lancé par le Secrétaire
général sur les nouveaux défis auxquels le monde doit faire face, débat qui se
concentre maintenant sur les propositions du panel de haut niveau, permettra de
progresser dans la voie d'un renforcement des institutions multilatérales
chargées de la paix, de la sécurité et du développement. La France, qui souhaite
un développement solidaire et durable, continuera donc de prendre toute sa part
dans ce débat majeur pour notre avenir à tous. Elle poursuivra ses réflexions
sur ces questions avec ses partenaires, notamment ses partenaires de l'Union
européenne, dans la perspective du sommet de septembre 2005.
Mesdames et Messieurs, nous souhaitons que cette réunion majeure débouche sur
des propositions concrètes pour redresser une situation que nous savons
dangereuse. Beaucoup d'efforts, beaucoup d'idées sont nécessaires pour y
parvenir. Je vous souhaite donc, à tous et à toutes, à chacun, la bienvenue à
Paris pour ces journées de travail qui seront riches, fructueuses, où tout doit
être dit pour soutenir, encourager, quand elle fait défaut quelquefois, la
volonté politique, de telle sorte que nous ne manquions pas le rendez-vous de
septembre 2005.
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