Florence Parly : « Nous devons entretenir l’audace »

Pour la 1ère fois depuis la fin de la Guerre froide, une LPM en expansion est votée. Pour la 1ère fois depuis plus de 20 ans, un renouvellement majeur des équipements des trois Armées va être lancé. Pour la 1ère fois, les conditions de vie et d’engagement des militaires et des civils …

Seul le prononcé fait foiSource : DICoD.

Madame la Ministre,
Monsieur le Chef d’état-major des armées, Monsieur le Délégué général,
Monsieur le Secrétaire général,
Mesdames et messieurs les officiers généraux, Mesdames et messieurs les directeurs,
Mesdames et messieurs, personnels militaires et civils de Balard et de nos armées.

Tout à l’heure, la loi de programmation militaire 2019-2025 a été adoptée définitivement.

Tout à l’heure, une nouvelle page de l’histoire de notre défense s’est ouverte.

Ne pensez pas qu’il s’agisse d’emphase ou d’effet d’annonces. Non.

Accompagnée du secrétaire général pour l'administration, Jean-Paul Bodin et du CEMA, le général François Lecointre, Florence Parly s'est adressée au personnel du ministère des Armées, le 28 juin 2018.Photo Pascal Segrette © DICOD. -
Florence Parly avec le SGA, Jean-Paul Bodin et le CEMA, le général François Lecointre

Pour la première fois depuis la fin de la Guerre froide, une loi de programmation militaire en expansion est votée. Pour la première fois depuis plus de 20 ans, un renouvellement majeur des équipements des trois Armées va être lancé. Pour la première fois, les conditions de vie et d’engagement des militaires et des civils de la défense sont au cœur de ce projet.

Le temps des privations n’avait que trop duré. Il est révolu.

Avec cette loi de programmation militaire, les Armées retrouvent pleinement les moyens de leurs actions. Elles retrouvent des moyens à la hauteur de nos ambitions et de notre activité opérationnelle.

Cette loi, vous en connaissez les traits structurants. Ce sont 295 milliards d’euros qui vont être consacrés à notre défense d’ici 2025. Ce sont des équipements de protection. Des matériels, livrés plus vite et en plus grand nombre. Ce sont des mesures pour les personnels, pour les familles, pour nos blessés. Ce sont des moyens pour le renseignement et la cybersécurité pour affronter pleinement les conflits de demain. Ce sont, enfin, des moyens investis pour l’innovation, pour la recherche et pour les technologies.

Cette loi vient achever, pour moi, un an au service des Armées, de la sécurité et de la protection des Français. Un an de service, que j’ai voulu être un an d’action[1]

Florence Parly : Bilan d'un an d'action -- Document DICoD. -

En septembre dernier, sur cette même place d’armes, je me suis fixé trois principes comme guides de mon engagement. 

Déterminée, d’abord, car les menaces sont trop fortes et les instabilités trop grandes pour nous permettre de présenter une main hésitante.

Depuis un an, grâce à l’aide des soldats de Chammal, le territoire de Daech s’est réduit à peau de chagrin. Et au Sahel, dans le cadre de l’opération Barkhane, nos militaires combattent intensément la menace djihadiste. Notre erreur serait de baisser la garde, de croire la menace terroriste moins présente. Rien n’est plus faux. Et quand je parle de terroristes, ma position est claire, elle est invariable : nous les traquerons, nous les trouverons, nous les neutraliserons.

La détermination, c’est aussi celle qui m’a poussée à réformer Sentinelle pour que nos militaires puissent continuer à assurer la sécurité des Français au plus proche de leur quotidien, de manière plus dynamique, dans les meilleures conditions.

Cette détermination, c’est celle qui m’a conduite à prendre des décisions qui attendaient depuis trop longtemps. Nos drones, au-delà de tout rationnel, n’étaient toujours pas armés. J’ai annoncé dès septembre que cela changerait. Le maintien en condition opérationnelle de nos aéronefs était depuis trop longtemps le talon d’Achille de nos Armées. Cela devait changer. J’ai annoncé la transformation du MCO aéronautique et en moins d’un an, une nouvelle direction, la DMAé, a vu le jour et j’en suis très attentivement les résultats.

Attentive, c’est la deuxième ligne de conduite que je me suis fixée. En un an, j’ai fait plus de six fois le tour de la Terre, j’ai réalisé plus de 120 déplacements dont plus de 50 auprès de nos forces. Partout, j’ai mis ma méthode en application : consulter, écouter, dialoguer. J’ai appris à votre contact, j’ai compris avec vos explications. Comptez sur moi pour décider et agir.

Rendons-nous compte que depuis des années, c’est sur les conditions de vie et d’engagement que les premières coupes étaient faites.

C’était inacceptable et j’ai décidé de remettre l’humain au cœur du ministère des Armées. C’est l’objectif du Plan Famille, c’est l’objectif de cette loi de programmation militaire.

Je suis fière que les petits équipements soient renouvelés. Fière que les affectations soient connues plus tôt, que le ministère permette aux militaires divorcés d’exercer plus facilement leurs droits de garde. Fière des nouveaux dispositifs du Plan Famille comme de la LPM pour nos blessés, pour faciliter leurs démarches et accompagner leur reconversion.

Attentive, aussi, car je connais le quotidien, la force et l’engagement de nos militaires qui, chaque jour, risquent leur vie pour notre pays. Ils sont l’origine et le souffle de notre travail et je voulais, ici, rendre hommage à tous ceux qui servent pour la France, à tous ceux qui souffrent dans leur chair ou dans leur esprit, à tous ceux qui ont donné leur vie pour servir notre pays.

Innovante, enfin, c’est le dernier adjectif que je veux lier à mon action. Une innovation sous tous ses aspects, par tous ses angles. Une innovation pour créer des Armées modernes, prêtes à affronter les défis du XXIe siècle.

L’innovation n’est pas négociable. Ou nous innovons et nous sommes à la pointe de la recherche et des technologies ou alors nous serons condamnés à être dépassés, exposés et tributaires des autres puissances. Ce n’est vraiment pas ma conception des choses.

C’est pourquoi j’ai décidé l’augmentation de plus d’un tiers des crédits consacrés à la recherche et aux technologies. J’ai lancé la DGNum, chargée de mettre en musique la révolution numérique au sein du ministère et avec « Défense Connect », j’ai présenté un plan d’action complet pour la digitalisation du ministère des Armées. Definvest, le premier fonds d’investissement commun entre la DGA et Bpifrance, a été créé et a déjà réussi son premier investissement. J’ai lancé, enfin, l’agence pour l’innovation de défense, résolument ouverte vers l’économie civile, les start-up, les coopérations, l’Europe.

L’innovation, je vous l’ai déjà dit par le passé, c’est avant tout un état d’esprit. Nous devons entretenir l’audace, l’esprit d’initiative, la soif d’entreprendre. Nous ne devons pas nous contenter des veilles recettes ou nos reposer sur nos acquis. Dans nos directions, nos services et nos Armées, les phrases : « ce n’est pas possible » ou « on n’a jamais fait comme ça » ne sont pas et ne doivent jamais être des objections valables. Evitons aussi une interprétation trop extensive du principe de précaution et réapprenons à évaluer, prendre et assumer les risques.

Et quand on parle de projets qu’on a longtemps cru impossibles, j’en viens assez naturellement à l’Europe. L’Europe de la défense a longtemps été un sujet de colloque, aujourd’hui, elle devient une réalité. L’Union européenne accorde un budget considérable au Fonds européen de défense. Et nous nous sommes unis, avec l’Allemagne, pour construire le char de combat de demain et le système de combat aérien du futur. Qui aurait pu l’imaginer, il y a deux ans seulement ?

Pas plus tard que lundi, j’étais à Luxembourg et avec 8 autres nations d’Europe, nous avons donné vie à l’Initiative européenne d’intervention, lancée il y a moins d’un an par le Président de la République. C’est le prélude à une autonomie stratégique européenne, pour des armées européennes, capables de se comprendre et d’agir ensemble.

Il y avait urgence pour nos Armées. Urgence pour réparer les carences du passé et préparer des Armées modernes, adaptées aux conflits de demain. Moins d’un an s’est écoulé entre les travaux de la Revue stratégique et l’adoption définitive de la LPM, et c’est un travail considérable que nous avons mené ensemble.

Vous avez su répondre aux défis, accepter les décisions et les arbitrages.

Il faut continuer maintenant, accentuer le mouvement. Aujourd’hui, pour beaucoup, la LPM, ce sont des chiffres et des principes. La transformation et la modernisation, ce sont des concepts et des idées. Il faut inscrire nos promesses dans le réel. Cette année sera celle des actes, des avancées concrètes, des améliorations sensibles.

Le Président de la République a décidé que des moyens considérables seraient confiés à nos Armées. Le Parlement a soutenu cet effort. Aujourd’hui, ce sont tous les Français qui nous regardent, qui comptent sur nous pour assurer leur protection, pour garantir leur liberté. Nous devons être à la hauteur des moyens qui nous sont confiés. Nous devons engager et réussir les réformes qui ont été décidées. Vérifier, scrupuleusement, que chaque euro dépensé soit un euro utile.

La loi de programmation militaire devra être respectée parfaitement. Les équipements dont nos forces ont besoin devront être livrés dans les temps. Nos Armées attendent depuis trop longtemps : notre responsabilité est collective, chaque manquement serait une trahison.

Nous devons continuer à transformer le ministère. A le rendre plus simple, plus attractif, plus accessible. 16 chantiers de modernisation ont été lancés. 16 chantiers qui seront autant de révolutions et d’amélioration pour vos quotidiens. 16 chantiers que je mènerai avec vous, en vous écoutant, en vous consultant, car cette transformation est faite à votre service.

Je parlais de la DMAé, de la DGNum, elles savent que j’attends et que vous attendez beaucoup d’elles, elles savent que j’attends des résultats. J’annoncerai très prochainement des décisions pour moderniser le MCO terrestre. Et, dès la semaine prochaine, j’annoncerai des axes de transformation de la DGA, pour réaffirmer qu’elle est au service de nos Armées, pour permettre des procédures d’achat plus simples, des programmes plus réactifs et plus ouverts sur l’innovation.

Nous allons nous lancer dans une modernisation de la fonction RH avec une gestion plus simple, plus accessible, plus efficace. Nous allons améliorer l’organisation de nos structures de soutien, pour les rapprocher des besoins concrets du terrain.Nous allons simplifier les procédures administratives de ce Ministère, beaucoup trop complexes, génératrices de délais et consommatrices de ressources. Nous allons briser les barrières et cloisons entre services, directions, Etats-Majors, qui trop souvent entravent le travail en commun et nuisent à l’efficacité de notre action.

Ce ne sont que quelques exemples et de nombreux sujets nous attendent encore. Je pense, notamment, au Service national universel, qui rassemblera la jeunesse et brisera les carcans sociaux. Cette ambition du Président de la République, nous la partageons tous. Nous voyons bien ce que nous pouvons lui apporter et notre ministère des Armées jouera pleinement son rôle pour bâtir ce projet de société.

Tous ces défis, tous ces chantiers de transformation, ne concernent pas une entité ou un service en particulier. Non. Ils sont transverses et nous concernenttous. Chaque direction, chaque service, chaque armée, chaque unité sur le terrain, doit donc se demander, aussi, ce qu’elle peut apporter pour la transformation du ministère. C’est pourquoi j’ai demandé au chef d’état-major des Armées avec les chefs d’état-major d’armée, au secrétaire général pour l’administration avec chacun de ses directeurs et au délégué général pour l’armement, d’établir pour tous les chantiers de transformation une feuille de route claire, réaliste, responsable. Des feuilles de route auxquelles je fixe des objectifs clairs : simplicité, efficacité, audace.

Chacun doit s’approprier ce mouvement de modernisation, dans le respect de sa culture, de ses valeurs, de son histoire. Il ne s’agit certainement pas d’imposer un modèle unique désincarné, mais de confier à chacun la responsabilité de trouver les moyens les mieux adaptés pour être efficace.

La réussite de ce ministère, la réussite de nos Armées, c’est l’affaire de tous. Nous avons obtenu des moyens exceptionnels, maintenant, les choses sérieuses commencent. Montrons-nous dignes de ces moyens, ne cédons jamais aux sirènes de l’attentisme. L’heure est au travail et pour les années qui viennent, je ne vous promets qu’une chose : de l’action, de l’action et encore de l’action.

Aujourd’hui, je me tiens devant vous comme demain je me tiendrai devant les Français. Vous savez ce que j’attends de vous. Vous connaissez les défis et les responsabilités qui sont les nôtres. Je compte sur vous comme vous pouvez compter sur moi.

Et, grâce à notre travail, grâce à notre ardente volonté de réforme et de réussite, je pourrai dire, fièrement: « soldats, marins, aviateurs, gendarmes, personnels civils: toute notre communauté de défense répond présent, comme toujours, pour les Français, pour la République, pour la France ».

Vive la République ! Vive la France !

 [1] 1 an d'action : Un premier bilan, par Florence Parly, ministre des Armées