Un nouveau sauvetage en mer réussi par l’EH 1/67 « Pyrénées »

Depuis plusieurs décennies, l’Escadron d'hélicoptères 1/67 « Pyrénées » assure une alerte permanente pour la SAR (Search And Rescue) dans la région Sud-Ouest, au profit des aéronefs en détresse, civils et militaires, et des bateaux sur une large zone atlantique…

La mission SAR

Depuis plusieurs décennies,[1l’Escadron d’Hélicoptères 1/67 « Pyrénées »[2assure une alerte permanente pour la SAR (Search And Rescue) dans la région Sud-Ouest, au profit des aéronefs en détresse, civils et militaires, et des bateaux (commerce, pêche, plaisance) sur une large zone atlantique couvrant une partie du Golfe de Gascogne.

Caracal de l'E.H. Pyrénées posé sur la plage -- Photo Olivier Millet © Armée de l'Air. -
Caracal posé sur la plage d'Anglet

Les sauvetages en mer sont des missions de sauvetage qui demandent un grand professionnalisme car elles ont régulièrement lieu de nuit et par mauvaises conditions météorologiques engendrant une mer agitée, cause première de la majorité des naufrages.[3Avec l’hélicoptère H225-M Caracal, doté d’équipements spécifiques pour cette mission, d’une soute spacieuse, les équipages de Cazaux, incluant une équipe médicale, sont aguerris à cette mission qui nécessite des savoir-faire de haut niveau.[4Ils entrent dans la palette des capacités opérationnelles exceptionnelles de cet escadron, notamment la récupération des équipages d'avions de chasse éjectés en teritoire ennemi (CSAR = RESCO)[5et l'aptitude, unique en Europe, au ravitaillement en vol de nuit.

Mise en route par temps de brouillard d'un Caracal pour une mission de sauvetage de nuit -- Photo Olivier Millet © Armée de l'Air. -
Mise en route par temps de brouillard d'un Caracal pour une mission de sauvetage de nuit

Depuis le début de l’année, l’EH est intervenu 33 fois pour des sauvetages en mer, le plus souvent de nuit et par mauvaises conditions météorologiques, parfois très loin au large des côtes. Il peut intervenir jusqu’à 150 miles nautiques (275 Km) des côtes, avec une durée d’intervention sur zone de 40 minutes. Cela impose des équipages aguerris au vol sous jumelles de vision nocturne, des mécaniciens navigants treuillistes très entrainés au treuillage sur bateau de nuit par mer agitée, et des sauveteurs-plongeurs capables de plonger de nuit sous un voilier retourné pour chercher les naufragés dans la coque remplie d’eau.

-- Photo Nicolas Delbart © Armée de l'Air. -

En bref, cela n’est pas « un sport de masse » !

Le récit qui suit du sauvetage, dans la nuit du 29 au 30 novembre, est impressionnant et inspire un profond respect pour ces équipages, qui sont toujours d’une grande modestie, et qui prennent régulièrement des risques importants pour sauver des naufragés.

On ne peut manquer de s’interroger sur la pertinence, pour un plaisancier, de sortir en mer lorsque les prévisions météorologiques sont si mauvaises.

Par le général (2s) Philippe Carpentier (*)

Un sauvetage en mer dans des conditions météorologiques épouvantables

Engagé au milieu de la nuit par le CROSS-A [6] d’Etel (au Sud de Lorient) pour porter assistance à l’équipage d’un voilier en détresse au large de la Pointe du Médoc, l’équipage du Caracal d’alerte de la base aérienne de Cazaux arrive rapidement sur zone et constate que l’effet de la marée descendante dans l’estuaire de la gironde, cumulé à une houle de 4 m formée, fait déferler les vagues dans un vent de 20 nœuds. L’hélicoptère EC-145 de la Sécurité Civile est sur place mais les conditions météorologiques et de mer, ainsi que l’absence de plongeur à bord,  ne lui permettent pas d’intervenir. La coque du voilier est rapidement repérée, au milieu de nombreux débris qui témoignent de la violence des éléments qui ont fait tomber le mat sur bâbord. Repérant un objet qui semble être un gilet de sauvetage à 600 mètres de la coque, l’hélicoptère se présente en stationnaire pour lever le doute. Le système du Caracal est à ses limites, tous les voyants ambres du pilote automatique sont allumés. Un sauveteur-plongeur héliporté (SPH) est malgré tout descendu pour s’assurer que personne n’est à proximité du gilet de sauvetage. Arrivé dans l’eau, l’équipage observe le plongeur multiplier les apnées entre deux déferlantes. Il est en fait en train d’équiper un naufragé d’une brassière pour le hisser à bord par hélitreuillage.

Entraînement à la récupération d’un blessé sur bateau, par un équipage Caracal de l’EH du Pyrénées, sur la vedette de la SNSM -- Photo © Armée de l'Air. -
Entraînement à la récupération d’un blessé sur bateau (SNSM)

Au moment où le plongeur remonte à bord avec le naufragé, la vedette de la SNSM présente sur zone, prend une déferlante par le travers et manque de chavirer, en roulant de 80 degrés sur bâbord. Un équipier de la vedette est littéralement éjecté par-dessus bord, sa longe d’assurance ayant été rompue par la violence de l’impact. Cette fois, ce sont les deux SPH qui redescendent à l’eau pour prendre en compte le rescapé en état de choc. L’un deux tient le câble du treuil, seul lien avec l’hélicoptère pendant que l’autre passe une brassière de hissage à son camarade de la SNSM. Il est obligé de se détacher du câble du treuil pour permettre à son collègue de sécuriser la remontée de l’équipier de la SNSM. Laisser un plongeur dans une mer démontée est toujours stressant pour le commandant de bord car sa récupération peut s’avérer problématique. Pendant ce temps, l’équipe médicale essaie, en vain, de ranimer le premier naufragé.

Entraînement à la récupération d’un blessé sur bateau, par un équipage Caracal de l’EH du Pyrénées, sur la vedette de la SNSM -- Photo © Armée de l'Air. -
Entraînement à la récupération d’un blessé sur le bateau de la SNSM

A l’arrivée à bord du Caracal, l’équipier de la vedette retournée présente des signes de désorientation, visiblement en état de choc. Son casque de sécurité est endommagé et laisse voir qu’il a subi un choc important à la tête.

L’équipe médicale le prend alors en compte et lui prodigue les premiers soins pendant que l’équipage affine sa stratégie pour récupérer la femme restant encore sur le voilier démâté.

Le mat, affalé sur bâbord, agit comme une ancre flottante et la coque qui tangue et roule de plus de 40 degrés à chaque vague, fait effet de brise lame sur le tribord, laissant quelques mètres d’eau plus calme à proximité de la coque. Il est décidé, cette fois, d’y descendre un seul plongeur pour accélérer la récupération.

Remontée d’un blessé conditionné sur une civière par un équipage Caracal de l’EH du Pyrénées -- Photo © Armée de l'Air. -
Remontée d’un blessé conditionné sur une civière par un équipage Caracal

Pendant la descente, le plongeur prend de plein fouet plusieurs paquets de mers, de véritables murs d’eau qui se jettent sur lui. Une fois à l’eau il fait signe au dernier naufragé à bord du voilier, l’épouse du premier naufragé récupéré, de sauter à l’eau pour le rejoindre, les mouvements de la coque l’empêchant de monter à bord. Au même moment, les pilotes aperçoivent au loin un train de trois vagues, plus fortes que les autres, qui s’apprêtent à déferler sur le voilier. Dans les quelques secondes de calme relatif qui précèdent ces vagues, la femme en détresse se jette à l’eau, immédiatement agrippée par le plongeur qui palme à toute vitesse, à l’opposé de la coque, les lames qui arrivent faisant craindre le pire. Il équipe rapidement le dernier naufragé d’une brassière, en continuant à palmer pour s’éloigner de la coque, fait signe au treuilliste qui les remonte au moment même où la première vague déferle. Il a fait preuve d’un grand courage et d’une grande abnégation au service de la mission de sauvetage.

Blessée à la tête, en hypothermie et en état de choc, cette dernière rescapée, est prise en charge par l’équipe médicale jusqu’au poser à l’Hôpital Militaire Robert Picqué de Bordeaux où elle est prise en compte par le service des urgences, comme ses deux camarades d’infortune.

Pendant le trajet vers l’hôpital, et leur retour final vers Cazaux, les conditions météorologiques imposent au Caracal de monter dans la couche nuageuse, et de passer au vol aux instruments, par deux fois pour s’affranchir de la pluie intense réduisant drastiquement la  visibilité et empêchant de poursuivre en vol à vue.

(*) Le général (2s) Philippe Carpentier est président de l’Association « Les Amis du Pyrénées »

[1] Voir L'EH "1/67" Pyrénées de nouveau à l'honneur, (11-02-2014) et 50 ans pour les sauveteurs-plongeurs héliportés par l’aspirant Romain Bresson, Armée de l’Air, (09-07-2018).

[2] Les noces d'or de l’Escadron d’hélicoptères 1/67 « Pyrénées » de Cazaux, (04-07-2012)

[3] EH 1/67 "Pyrénées" — Cazaux 2012 : Ordre du jour N° 10, (04-07-2012).

[4] Hélicoptères: un savoir-faire français de haut niveau: Allocution du général de brigade aérienne Philippe Gasnot, commandant la Brigade d’Appui et de Projection du Commandement des forces aériennes (CFA) lors des 50 ans de l'Escadron d'hélicoptères 1/67 Pyrénées sur la BA 120 "Commandant Marzac" de Cazaux, (04-07-2012).

[5] L'escadron d'hélicoptères 1/67 Pyrénées, unité volante de l'Armée de l'air stationnée sur la BA 120 "Commandant Marzac" de Cazaux, a été constitué à compter du 1er septembre 2000, sur décision du chef d’état-major des armées, en organisme à vocation interarmées, devenant dès lors le pôle d’expertise interarmées de la « RESCo » (RESCO : Recherche et Sauvetage au Combat). Voir "L’escadron d'hélicoptères (EH) 01.67 « Pyrénées » de l'armée de l'Air" (21-06-2013). Entretien à Cazaux avec le LCL Fabien Gisbert CDT l'escadron d'hélicoptères "01-67".

[6] (CROSS) : Centre Régional des Opérations de Surveillance et de Sauvetage (CROSS-A ETEL (Lorient) : Golfe de Gascogne/Atlantique).

Ordre du jour n°20 du GCA Jean Rondel -- Source CFA/Armée de l'Air. -
50 ans du "SPH" : Ordre du jour n°20 du GCA Jean Rondel — Source CFA/Armée de l'Air

50 ans du SPH : ODJ n°20 du GCA Jean Rondel -- Source CFA/Armée de l'Air. -