L’Allemagne et la diplomatie économique

Après 70 ans d‘existence, le Comité Est de l’économie allemande (Ost Auschuss) se penche sur les défis stratégiques de l’économie allemande face aux évolutions actuelles en Europe de l’Est.

Discours de Hans-Ulrich Engel, son président, pour le 70e anniversaire du Comité pour l’Est de l’économie allemande —[1] Berlin, le 12 décembre 2022 — Source: Ost-Ausschuss der deutschen Wirtschaft

Monsieur le Vice-chancelier Habeck,

Monsieur le Vice-Premier Ministre Tileuberdi

Excellences,

Chers membres, partenaires et amis du Comité pour l’Europe de l’Est de l’économie allemande

chers invités,

Au nom du comité directeur et de la présidence, je vous souhaite la bienvenue à notre fête d’anniversaire !

Nous partageons tous le sentiment de vivre dans une époque agitée et incertaine. L’année 2022 qui s’achève y contribue largement et laissera des traces profondes. De nombreuses certitudes sont actuellement mises à l’épreuve.

Un anniversaire comme celui que nous célébrons aujourd’hui est une bonne occasion de faire une pause pour les 70 ans du Comité Est de l’économie allemande.

Nous entendons profiter de cette journée pour examiner ensemble les objectifs qui ont été atteints au cours de ces sept décennies, mais aussi ceux qui sont restés hors de portée.

Hans-Ulrich Engel président de l’Ost Ausschuss — Photo BASF —

hans ulrich engel 2a

La guerre d’agression russe contre l’Ukraine, qui cause chaque jour des souffrances inimaginables, marque une rupture d’époque – également pour notre Comité Est. 

L’engagement économique construit des ponts entre les hommes.

Cette conviction, qui guide le Comité Est depuis sa création pendant la guerre froide il y a 70 ans, a été profondément ébranlée cette année.

Une chose est claire : nous devons réévaluer les chances et les risques des coopérations internationales après cette expérience, c’est inévitable. Quelles limites les entreprises et les associations doivent-elles se fixer en matière de coopération internationale ?

Ces derniers mois, l’Ost Ausschuss s’est penché de manière intensive sur cette question au sein de ses instances. C’est avec plaisir que nous poursuivrons cette discussion avec vous cet après-midi.

oa 221212 186a
Le chancelier Scholz félicite Hans-Ulrich Engel pour ce 70e anniversaire — Photo Christian Kruppa/Ost-Ausschuss

Mesdames et Messieurs,

Un Comité Est ne peut pas influencer la guerre d’agression russe contre l’Ukraine. Mais lorsqu’il s’agit de l’aide d’urgence et de la reconstruction à moyen terme de l’Ukraine, ce Comité Est est prêt: il aide aujourd’hui et continuera à aider.

Nous avons déjà utilisé une partie de l’argent que nous avions collecté pour l’organisation de cette année anniversaire pour créer un « Service Desk Ukraine ». Celui-ci sert d’intermédiaire entre les entreprises allemandes et les partenaires ukrainiens. Actuellement, cela signifie notamment organiser un soutien pour la reconstruction de l’infrastructure énergétique ukrainienne. Je tiens ici à remercier chaleureusement toutes les entreprises qui ont soutenu financièrement cette démarche et qui ont apporté une aide matérielle au cours des derniers mois. Nous avons besoin de persévérance, veuillez continuer à vous engager dans cette voie !

Le comité pour l’Est était un « enfant de la misère », comme l’a dit le légendaire Otto Wolff von Amerongen, qui a marqué de son empreinte le comité pour l’Est pendant 45 années fabuleuses en tant que président.

Il y a 70 ans, l’Allemagne était un pays détruit et divisé. Le « rideau de fer » s’étendait au milieu du pays et en même temps à travers l’Europe. Derrière ce rideau, il n’y avait ni démocratie ni libre entreprise. Il s’agissait en même temps de pays dans lesquels des Allemands avaient commis les crimes les plus horribles quelques années auparavant.

Les premiers contrats commerciaux allemands avec la Roumanie et la Chine ont été négociés dans des conditions rocambolesques. En 1957, une délégation de neuf membres de l’Ost-Ausschuss s’est rendue à Hong Kong, a pris le train pendant huit jours jusqu’à Pékin, puis a négocié pendant trois semaines, finalement avec succès, avec le comité commercial chinois.

Oui, vous avez bien entendu :

Dans les années 1950, le Comité Est a conclu des contrats commerciaux au nom du gouvernement fédéral, bien qu’il s’agisse à l’époque, comme aujourd’hui, d’un organe indépendant composé d’associations économiques et d’entreprises.

Cette tâche de diplomatie économique incombait alors à l‘Ost-Ausschuss, car il n’existait pas de relations officielles entre la République fédérale et ces pays.

« L’économie précédait alors la politique », comme l’a dit un jour Egon Bahr.

Sans une base de confiance exceptionnellement forte entre l’économie et la politique, le Comité pour l’Est n’aurait sans doute eu qu’une courte durée de vie.

Dès le début, il s’agissait de jeter des ponts entre l’économie et la politique – dans les pays partenaires du Comité Est comme en Allemagne même : l’idée de la création de ce Comité Est avait été lancée par des associations économiques sous la direction du BDI.

Mais l’impulsion décisive est venue du ministre fédéral de l’économie de l’époque, Ludwig Erhard. Le 9 octobre 1952, Erhard s’est fait présenter à Bonn le concept du comité pour l’Est. Et il donna immédiatement aux entrepreneurs un énorme catalogue de tâches : le Comité pour l’Est devait régler les relations commerciales avec l’Union soviétique, la Chine, la Roumanie et d’autres pays communistes.

Ludwig Erhard et le monde de l’économie avaient l’espoir de renouer avec l’époque prospère du commerce allemand avec l’Est. Dans les années 1920, celui-ci avait encore atteint une part de plus de 20 pour cent des exportations allemandes.

En 1952, on partait presque de zéro. Aujourd’hui, 70 ans plus tard, le commerce allemand avec les 29 pays dans lesquels le Comité Est soutient les entreprises allemandes a franchi la barre des 500 milliards d’euros. Cela correspond à près de 20 pour cent du commerce extérieur total de l’Allemagne. Depuis 1990, les investisseurs allemands ont investi plus de 140 milliards d’euros en Europe de l’Est, créant ainsi environ deux millions d’emplois.

Les 29 pays du Comité Est sont d’une grande importance économique pour l’économie allemande.

Cela reste une histoire à succès à laquelle de nombreuses entreprises allemandes ont contribué.

juni 13 1989 gorbatschow schewardnadse oa koln2
Le 13 juin 1989, M.Gorbatchev et É.Schewardnadse à Cologne invités de l’Ost Ausschuss — Photo Olligschläger

De nombreux pays dont s’occupe l’Ost-Ausschuss sont aujourd’hui représentés par leurs ambassadeurs et ambassadrices. Excellences, vous méritez tous nos remerciements pour la confiance et l’amitié que vous nous avez témoignées au cours de ces 70 dernières années !

Nous souhaitons remercier tout particulièrement certaines personnes qui ont marqué le Comité des pays de l’Est au cours des dernières décennies et sommes très heureux de la participation de nos deux anciens présidents : le professeur Klaus Mangold et M. Eckhard Cordes.

Cher Klaus, cher Monsieur Cordes, levez-vous un instant, s’il vous plaît ! (Applaudissements)

Trois de nos anciens directeurs sont également présents aujourd’hui : le professeur Rainer Lindner, Oliver Wieck et Karl-Hermann Fink !

Veuillez vous lever également. (Applaudissements)

Nos remerciements s’étendent à nos sept associations de soutien et aux nombreux entrepreneurs qui participent et ont participé à nos comités et aux 13 groupes de travail actuels. Merci pour votre engagement !

Comme je l’ai déjà mentionné, le principal artisan de la naissance du Ost-Ausschuss a peut-être été le ministre fédéral de l’Économie Ludwig Erhard en 1952.[1] C’est donc pour nous une grande joie et un grand honneur d’accueillir son successeur 70 ans plus tard.

Monsieur le Ministre, cher Monsieur Habeck,

Vous êtes parmi nous aujourd’hui en tant que vice-chancelier et ministre fédéral de l’économie et de la protection du climat ! Nous sommes très impatients d’entendre votre discours !

The floor is yours !

[1] L’idée de ce comité pour l’Est (Ost Ausschuss) de l’économie allemande revient à Ludwig Erhard, futur chancelier, alors ministre fédéral de l’Économie, pour développer les échanges économiques de la République fédérale d’Allemagne avec l’Europe orientale, l’URSS et la Chine. Fondé à Cologne le 17 décembre 1952 ce Comité a été rattaché au Bundesverband der Deutschen Industrie (BDI) et fête donc ses 70 ans d’existence. Sur l’historique, voir The Founding of the Ost-Ausschuss in 1952 by Andreas Metz.

Voir également : « Olaf Scholz: L’Europe va changer, l’UE va changer en s’étendant vers l’Est »