La Croix de guerre

La croix de guerre est une décoration militaire instituée en 1915 pour récompenser les soldats ayant fait preuve d’une conduite exceptionnelle face à l’ennemi.

Pendant les premiers mois du conflit, la France ne dispose pas de décoration spécifique pour gratifier et matérialiser les actes de bravoure individuels des soldats. À cette époque, il n’existe que la Légion d’honneur, créée en 1802 par Napoléon Bonaparte, la médaille militaire, instituée en 1852 par Louis-Napoléon Bonaparte, et les citations à l’ordre du jour des régiments. La Russie avait, elle, la croix de Saint-Georges ; l’Angleterre la croix de Victoria ; l’Italie la médaille de la valeur militaire ; l’Allemagne la croix de fer. La France n’avait elle rien d’équivalent.

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Croix de guerre attribuée à la commune de Maing (Nord) le 12 août 1922

A l’origine de la création de la « Croix de guerre », le besoin ressenti dès les premiers mois de la Première Guerre mondiale au front de créer une récompense « visible » pour les combattants qui s’étaient distingués. Devant l’âpreté des combats il fallait pouvoir sur le champ de bataille honorer les plus braves, leur courage, pour mieux galvaniser ceux qui, en première ligne, étaient en permanence sous le feu de l’ennemi. Même si elle était militaire, cette décoration ne devait pas être réservée aux seuls militaires. Au-delà d’une simple récompense, l’idée pour le commandement militaire était de pouvoir témoigner publiquement la reconnaissance de la Nation.

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Timbre commémoratif du Cinquantenaire de la Croix de guerre

Dans les armées, il existait bien la « citation à l’ordre du jour » mais ce n’était qu’un témoignage écrit, qu’on retrouvait dans les communiqués, les états de service et le livret militaire. Pour être efficace, cette décoration « administrative » devait laisser la place à « un signe distinctif clair et visible », qui permettait au chef de décorer les plus vaillants de ses soldats sur les lieux même des combats.

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Timbre commémoratif du Centenaire de la Croix de guerre en 2015

C’est ainsi qu’en décembre 1914, le général Boëlle, commandant le IVe Corps, tente de convaincre le haut-commandement de la nécessité de créer une telle décoration. Trois députés, Maurice Barrès, Georges Bonnefous et Émile Driant, s’emparent du projet et déposent une proposition de Loi signé par 63 autres députés. Le projet est lancé.

Lors de sa présentation à l’Assemblée Émile Driant déclare : « Créons un ordre récompensant la valeur militaire, mais en lui donnant un nom bref qui sonne clairement et qui, à lui seul, exclut la faveur de l’ancienneté. On l’appellera la Croix de guerre, ce sera une croix de bronze clair, à quatre branches, surmontée d’une couronne de lauriers, et suspendue à un ruban vert uni, le vert de la médaille de 1870-1871, débarrassé des rayures noires qui symbolisaient le deuil de l’autre siècle. »

Croix de guerre 1914-1918

Après la présentation de plusieurs projets de médaille, c’est le sculpteur Paul-Albert Bartholomé qui est désigné pour créer le modèle. Le Sénat adopte « le ruban vert rompu par de fines rayures rouges, associant le symbole du sang versé à celui de l’espérance et rappelant celui de la médaille de Sainte-Hélène donnée aux vieux grognards du Premier Empire ».

« La Croix de guerre instituée par la loi du 8 avril 1915 est en bronze florentin du modèle de 37 mm, à quatre branches, deux épées croisées.

Le centre représente à l’avers une tête de République au bonnet phrygien ornée d’une couronne de lauriers avec en exergue « République française ». Il porte au revers l’inscription « 1914-1915 ». (Art. 1er du décret du 23 avril 1915).

Ruban : vert avec liseré rouge à chaque bord et comptant cinq branches rouges verticales de 1,5 mm.

Origine du ruban : Le ruban de la Croix de guerre de 1914-1918 est celui de la médaille de Sainte-Hélène. Napoléon III récompensait, grâce à elle, les vétérans de l’armée du Premier Empire.

Après la Croix de guerre 14-18, la croix de guerre 1939-1945 est une décoration militaire française destinée à distinguer des personnes (civiles et militaires), des unités, des villes ou des institutions ayant fait l’objet d’une citation pour fait de guerre au cours de la Seconde Guerre Mondiale. Réalisée sur le même modèle que celle de 1914-1918, mais avec la date 1939 inscrite au revers, et suspendue à un nouveau ruban de deux bandes rouges extérieures encadrant quatre bandes vertes séparées par trois fines rayures rouges.

La seule croix de guerre décernée aujourd’hui est celle des “TOE” – les Théâtres d’opérations extérieurs – créée en 1921. La dernière fois qu’elle a été « réactivée » comme le précise Loïc Salmon, « c’était pendant la guerre du Golfe qui avait donné lieu à un vote préalable au Parlement en 1991

« Parmi les plus belles décorations  décernées à nos soldats de l’armée française, la croix de Guerre des théâtres d’opérations extérieurs tient une place historique et très  particulière » comme le rappelle le colonel Bachette-Peyrade dans l’éditorial du numéro 343 de la revue consacré au centenaire de la croix de guerre.

« Elle constitue dès 1921, il y a cent ans, à l’image de la prestigieuse croix de Guerre 1914-1918, le prix du sang, mais souvent aussi le prix de souffrances, sur des théâtres d’opérations très  éloignés de la métropole, souvent oubliés de nos concitoyens peu au fait des données géopolitiques de l’époque. Opérations de pacification, d’assistance au développement ou de lutte contre les totalitarismes qui asservissent les peuples, qui furent l’honneur de la France protectrice des opprimés.

L‘Association nationale des croix de guerre et de la valeur militaire, forte des valeurs morales dont elle est la gardienne, avait par conséquent un devoir impérieux de servir  une fois de plus la « marque du Courage », que constitue la croix de Guerre des théâtres d’opérations extérieurs,  et ses titulaires, soldats, unités militaires, villes et aussi institutions civiles, à l’image des croix de Guerre de nos valeureux combattants des deux guerres mondiales.» (Télécharger le dossier)

amiral guepratt be

Après la Première Guerre Mondiale, il faudra rassembler rassembler dans un même esprit « croix de guerre et valeur militaire » les personnes physiques et les personnes morales (communes, unités militaires et institutions civiles) ayant fait l’objet d’une citation comportant l’attribution d’une croix de guerre (1914-1918, 1939-1945 ou TOE), de la croix de la Valeur militaire, de la médaille de la Gendarmerie nationale ou de la médaille d’or de la Défense nationale pour citation sans croix. D’où la création en 1919 de l’ANCGVM – l’association nationale des croix de guerre et de la valeur militaire (ANCGVM). Elle a d’abord été dirigée par le vice-amiral Émile Guépratte, héros de la guerre des Dardanelles.

Vice-Amiral Émile Guépratte – Archives Musée des Étoiles

A l’occasion de la célébration du 8 mai ou du 11 novembre, la Voix du Béarn a trouvé que ce sujet mal connu devait être traité en invitant trois invités : le colonel (H) Michel Bachette-Peyrade, président de l’ANCGVM, le colonel (H) Pierre Castillon, polytechnicien, président-fondateur de l’Académie des Technologies et le capitaine de vaisseau (H) Loïc Salmon, rédacteur en chef de l’excellente revue et du site « Croix de Guerre et Valeur militaire ».[1]

Une association patriotique centenaire très dynamique dans toute la France malgré le fait que la plupart de ses anciens membres au titre de 14-18 ou de 39-45 aient aujourd’hui disparu. Avec nos invités, nous verrons comment ce travail de mémoire est fait inlassablement par des bénévoles.

Jean-Michel Poulot et Joël-François Dumont

[1] Site de la Croix de guerre et de la Valeur militaire