Donald Trump et le dollar — Photo IA © E-S
Amiral Christian Girard

Quelle stratégie face aux États-Unis ?

Samuel Huntington conclut, en 2004, son livre magistral sur l’identité des États-Unis en envisageant leur avenir sous la forme de trois hypothèses. Soit l’Amérique s’ouvre au monde et l’Amérique devient le monde, soit l’Amérique va vers le monde et le monde devient l’Amérique, soit, plus probable, l’Amérique se recentre sur son identité originelle, se ferme vis-à-vis de l’extérieur, revient d’une façon ou une autre à ses valeurs fondatrices, celles du protestantisme contes-tataire, isolationniste et messianique des pères fondateurs. Ce qui est en train d’advenir semble bien correspondre à cette dernière vision envisagée il y a plus de vingt années par le célèbre professeur. Elle manifeste, par-delà l’arrogance des nouveaux diri-geants américains, la réaction à un sentiment de vulnérabilité et de faiblesse de l’hyperpuissance face à l’évolution du monde, la nostalgie d’un temps et d’un monde révolus. S’il s’agit bien de retrouver une grandeur passée, c’est que la situation actuelle est mauvaise : perte des valeurs morales et religieuses, désindustrialisation, surendettement, trajectoire bud-gétaire insoutenable.

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Jeunes migrants africains — Illustration Ia © European-Security
Quentin Dickinson

Destins liés

Traditionnellement fonds de commerce de l’extrême-droite, la méfiance, voire l’hostilité, vis-à-vis de toutes les catégories de migrants s’étend désormais à l’ensemble de la classe politique. On ne fait guère plus la différence entre un voyou en séjour illégal et un réfugié hautement qualifié. Souvenez-vous : du temps de la Guerre froide, l’expression courante qui désignait la ligne de démarcation entre les deux Allemagne, c’était le Mur de la Honte ; or, aujourd’hui, des murs, on en redemande partout. Pour se persua-der de la plus évidente des raisons, aujourd’hui déjà, il suffit de regarder autour de soi : jadis supplétifs de la production industrielle, les immigrés sont devenus des rouages indispensables de l’économie des pays européens ; ils occupent le plus souvent les emplois réputés pénibles ou peu prestigieux que les Euro-péens ne veulent plus occuper. Et cette réalité n’a aucune chance de disparaître, d’autant que la natalité en baisse dans presque tous les pays développés n’est compensée (en partie) que par l’augmentation de la population immigrée, aujourd’hui parvenue à la troisième ou à la quatrième génération, et ayant conservé le choix de fonder des familles nombreuses.

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Huawei Gate — Photo AI © E-S
Quentin Dickinson

Huaweï-Gate : Le Parlement européen à nouveau discrédité

Ce qu’on appelle le Huawei-Gate, c’est une nouvelle affaire de corruption passive, sans doute à plus grande échelle même que le Qatar-Gate, il y a deux ans et demi, et qui entache un peu plus l’image de marque du Parlement européen. Avec le scandale du Qatar-Gate, comme le suggéréait à l’époque Quentin Dickinson, « l’heure de la tolérance zéro pour le Parlement européen venait de sonner.» La justice belge va devoir, une fois de plus, distinguer les responsables des coupables. Une première certitude, les Institutions européennes sont de nouveau écla-boussées. Pour résumer, le Parquet du Procureur du Roi à Bruxelles assure avoir mis au jour une affaire de corruption active, dont les quinze bénéficiaires seraient des élus actuels ou anciens, et dont les assistants seraient les petites mains. Et tout cela, au profit du géant chinois des télécommunications Huawei, à la recherche de plantureux contrats de déploiement de la 5G dans les pays de l’UE. Les faits auraient débuté en 2021 et se seraient très discrète-ment poursuivis jusqu’à très récemment. L’enquête est menée tambour battant par la justice belge

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Donald Trump au Groënland — Photo Leonardo AI/E-S
Quentin Dickinson

Main basse sur le continent blanc

Il faut particulièrement se méfier des stratèges auto-proclamés. Se basant sur la théorie du chaos, Donald Trump, à peine élu, décide de « renverser la table », convaincu à la fois de son bon sens, de son génie tactique et d’une expertise incomparable dans le domaine du « deal ». Affirmant que les règles inter-nationales ne servent à rien. sinon à constituer un obstacle au business juteux dont le reste du Monde aurait spolié l’Amérique. Pour les supporters du Make America Great Again, il faut d’urgence rendre à Jules ce qui serait à Jules. « Soit on vous le donne, soit vous le prenez.» Qu’il s’agisse du Panama, du Canada ou du Groënland, en attendant que Donald désigne de nouveaux objectifs stratégiques. Plus c’est simpliste, plus cela marche… Tout changerait donc pour que rien ne change ? Le moment de sidération passé, les partenaires d’hier sont d’abord saisis par le doute. Puis la confusion règne. Rien qui ne fasse plus peur aux marchés ! Wall Street affiche des pertes abyssales américaines, jour après jour. Pendant ce temps, l’Europe se réveille. Bruxelles reconduit ce jour les sanctions contre la Russie, le Canada et le Danemark se rebiffent après les dernières saillies de Trump. De quoi inspirer la chronique européenne de Quentin Dickinson cette semaine.

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Vice-amiral (2s) Christian Girard - Photo © DR
Amiral Christian Girard

Une initiative des démocraties libérales face à la nouvelle situation géopolitique

Plusieurs articles récents de spécialistes des États-Unis montrent que les décisions prises par le président Trump s’inspirent de, et s’inscrivent dans, un projet idéolo-gique alliant les néo-conservateurs et les libertariens américains. La fracture provoquée au niveau par les États-Unis est de caractère idéologique, voire culturel. Elle traversait déjà la société américaine et avait déterminé l’issue de l’élection présidentielle. Le récent discours du vice-président américain à Munich l’a prouvé sans aucun doute. Par-delà le rejet du « wokisme » et de ses excès, du sujet la liberté d’expression et du contrôle de la Tech, l’enjeu réel est celui de la démocratie libérale elle-même. Face à cet enjeu, la personnalité controversée du président n’est pas la seule cause de la situation actuelle comme le système médiatique le fait croire. Elle n’en est que le révélateur. Pourquoi cette dimension a-t-elle été ignorée dans ses conséquences immédiates et potentielles du côté européen jusqu’au dernier coup d’éclat de Donald Trump ?

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Trump_Zelensky dictateur © Patrick Chappatte
Quentin Dickinson

La grande confusion

« Ne jamais exécuter un ordre. Toujours attendre le contre-ordre, pour éviter le désordre.» Cette maxime chère à Courteline revient à la mode, nécessité faisant loi. Le côté pour le moins versatile de Donald Trump, fait que l’on ne sait plus à quel saint se vouer pour interpréter les déclarations de ce 47e président des États-Unis d’Amérique. Sainte-Rita est débordée. Même les Chinois y perdent leur latin ! « La vérité sort plus facilement de l’erreur que de la confusion », c’est bien connu. Avec Donald, la confusion s’est installée à la Maison-Blanche où Elon Musk, mène le bal, de quoi indisposer les ministres de Trump. Il n’y a pas que le sénateur Claude Malhuret pour voir en ce protégé de Donald un « bouffon sous kétamine ». A Moscou, cette confusion est pain bénie par Saint-Nicolas, Saint patron de la Russie. Des tars à Poutine sans oublier Tolstoï… Les Russes ont su tirer un profit immédiat sur le terrain des concessions unilatérales de Donald Trump à son ami Poutine dont il a repris le narratif ad nauseam. La confusion s’est installée et règne en maître à la Maison-Blanche. La période de sidération passée, le syndrome Trump s’installe dans les esprits. Et les Européens dans tout cela ?

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Back to Europe _ Statue de la Liberté (IA Photo)
Quentin Dickinson

Désarmant !

Le sommet extraordinaire européen sur les questions de défense et d’aide à l’Ukraine cons-titue un tournant historique. L’Europe entend couper le cordon et assumer son destin. Aban-donnée par les USA pour ne pas dire trahie par Donald Trump et son administration, l’Europe est condamnée à relever le défi. « Pour l’Europe, c’est maintenant ou jamais » comme l’a si bien dit le général Paloméros dans le Figaro. Les vingt-sept ont adopté à l’unanimité hier un plan prévoyant de dépenser 800 milliards d’euros pour leur défense. A Londres le 3 mars, à Bruxelles le 6, les États « unis » sans l’Amérique se cherchaient un leader du Monde Libre pour remplacer Donald Trump qui a tourné la page du lien transatlantique. On se demandait combien de temps il faudrait pour que les Américains se rendent enfin compte du naufrage auquel ils s’exposent. A Wall Street, c’est la chute. Les Échos le mentionnaient lundi déjà, le Monde revient sur le sujet ce jour. Après Tesla, c’est le secteur de l’armement qui est impacté comme le révèle Quentin Dickinson. Comme on dit de ce côté de l’Atlantique, « Bravo l’artiste, plus con que cela, tu meurs »

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Anti MAGA Car
Françoise Thom

Vladimir Putin’s Twofold Revenge 

The collusion, not to say complicity, between Donald Trump and Vladimir Putin in ousting Volodymir Zelensky and carving up Ukraine in the name of Russian “peace” is undoubtedly Washington’s best-kept secret. How has the United States of America been able to dismantle, in the space of four weeks, an exemplary security architecture and a transatlantic bond that had lasted 80 years? Trump’s America is in the process of carrying out a revolution inspired by the Putin model.
For Françoise Thom, « Trump and Vance have become the instruments of Zelensky’s political assassination. Ukraine publicly abandoned by its main ally from across the Atlantic, in the presence of a Russian journalist no less: this spectacle allows Moscow to hope to proceed to the second phase of its plan, the installation of a “pacifist” collaborator in power in Kyïv…
The Putinization of America is the realization of a plan nurtured by Russian leaders since the mid-1990s.”

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Le Point — Une du 2.03.2025
Françoise Thom

La double vengeance de Vladimir Poutine 

La connivence pour ne pas dire la complicité entre Donald Trump et Vladimir Poutine pour l’éviction de Volodymir Zelensky et le dépeçage de l’Ukraine au nom d’une « paix » russe est assurément le secret le mieux gardé de Washington. Comment les États-Unis d’Amérique ont-il pu en quatre semaines démanteler une architecture de sécurité exemplaire et un lien transatlantique qui avait duré 80 ans ? L’Amérique de Trump est en train de procéder à une révolution en s’inspirant du modèle poutinien.
Pour Françoise Thom, « Trump et Vance se sont fait les instruments de l’assassinat politique de Zelensky. L’Ukraine publiquement abandonnée par son principal allié d’outre-Atlantique, en présence d’un journaliste russe de surcroît : ce spectacle permet à Moscou de pouvoir espérer procéder à la deuxième phase de son plan, l’installation d’un collabo « pacifiste » au pouvoir à Kyïv… La poutinisation de l’Amérique est la réalisation d’un dessein nourri par les dirigeants russes depuis le milieu des années 1990.» 

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Le-Bureau Ovale transformé en saloon — Photo-©AI-E-S
Quentin Dickinson

Pile je gagne, face tu perds

Le Bureau ovale, censé être un lieu sacré aux États-Unis (pas pour Musk apparemment), est devenu le dernier saloon tendance MAGA où l’on « deale » sous les feux des projecteurs. « Pile, je gagne, Face, tu perds » a remplacé « donne moi ta montre et je te donnerai l’heure »… Ainsi en a décidé le nouveau shérif, entouré de ses adjoints étoilés et de quelques fans méritants. Les journa-listes professionnels (Associated Press) sont aujour-d’hui remplacés par des blogueurs complotistes qui marchent dans la combine. Cette fois-ci, la personne « Most Wanted » était Volodymir Zelensky. Condamné d’avance pour n’avoir pas donné les éléments prouvant que le fils de Joe était impliqué dans des affaires louches en Ukraine. Zelensky était censé céder à vie les richesses du sous-sol de l’Ukraine aux US contre des promesses fumeuses, remercier le shérif et s’excuser avant de démissionner pour laisser la place à quelqu’un de plus souple qui aurait l’oreille de Trump et la langue de Poutine. J.D. Vance, chargé des basses besognes, lancera l’estocade pour relayer un Donald visiblement à court d’argument après son poker-menteur !

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