Ce qui nous unit la France et la Grande-Bretagne est plus important que ce qui les sépare

Ce qui unit France et le
Royaume-Uni est plus important que ce qui les sépare
Pour le centenaire de l'Entente
Cordiale S.M. la Reine Elizabeth II reçue au Palais du Luxembourg par le
Président du Sénat, M. Christian Poncelet et le Président de l'Assemblée
nationale M. Jean-Louis Debré le mardi 6 avril 2004. II)
Discours de
M. Jean-Louis Debré,
Président de l'Assemblée Nationale.
Source:
Sénat, Paris.
Madame,
Alors que nous célébrons le centenaire de la Déclaration sur l'Entente Cordiale
que le Roi Edouard VII et le Président du Conseil Delcassé signèrent le 8 avril
1904, je tiens à vous dire à mon tour et au nom de l'ensemble des Députés
français, l'honneur que nous ressentons à vous accueillir. En effectuant à cette
occasion votre quatrième visite d'État dans notre pays, vous nous donnez un
nouveau témoignage de l'attachement que vous portez à la France et de l'amitié
qui unit depuis si longtemps la France et le Royaume-Uni.
Cette puissante amitié, elle est le fruit d'une longue histoire traversée de
rivalités, de guerres et d'alliances, qui, au fil des siècles, tissèrent entre
nos peuples si proches et pourtant si distincts, des liens complexes et très
étroits. Oserais-je aller jusqu'à dire que la compétition à laquelle se sont
longtemps livrées nos deux Nations, incarnant deux cultures et deux tempéraments
bien différents, a quelque peu nourri leur génie respectif et contribué à leur
rayonnement ? En tout état de cause, cette ancienne et singulière histoire, où
certaines victoires de l'un sonnèrent la défaite de l'autre, nous a appris à
nous connaître et à nous estimer, comme peuvent se connaître et s'estimer deux
Nations dotées d'une forte identité.
Ainsi que le notait Sir Winston Churchill, que liait au Chef de la France libre
une amitié parfois rugueuse mais faite d'admiration réciproque, "Le Tout
Puissant, dans sa sagesse infinie, n'a pas cru bon de créer les Français à
l'image des Anglais". Ils n'en partagent pas moins le même et profond
attachement aux valeurs essentielles que sont la liberté et la dignité de la
personne humaine. Lorsque les épreuves de l'Histoire mirent ces valeurs en
péril, Britanniques et Français surent transcender leurs différences pour se
retrouver ensemble dans un combat commun.
Forgée sur les champs de bataille de la Grande Guerre, qui vit tant de soldats
du Royaume payer de leur sang, aux côtés de leurs frères français et alliés, le
prix de notre liberté, cette fraternité d'armes s'illustra une nouvelle fois
dans le second conflit mondial. Nous avons tous dans nos mémoires l'admirable
ténacité dont sut alors faire preuve le peuple britannique sous la conduite
glorieuse de Sir Winston Churchill et sous l'égide de son Souverain, votre père
le Roi George VI. Nous savons tous combien la résistance, l'exemple et l'appui
de l'Angleterre, les encouragements du Roi et de la famille royale aidèrent le
Général de Gaulle à porter haut le drapeau de la France Libre et de la
Résistance française.
En ces circonstances terribles, la France et la Grande-Bretagne démontrèrent ce
qu'elles peuvent accomplir lorsqu'elles rassemblent leurs énergies. Dans
quelques semaines, le 60ème anniversaire du Débarquement nous donnera l'occasion
de célébrer ensemble, avec nos alliés, cette fraternité renouvelée sur les
plages de Normandie.
Soixante ans après ces hauts faits, cette Europe, que nous avons su défendre et
libérer par les armes, connaît, après l'heure de la réconciliation, une autre
aventure désormais pacifique, l'aventure de sa construction, une construction
dont la Grande-Bretagne et la France souhaitent qu'elle s'opère dans le respect
des États-Nations, dans le dépassement des égoïsmes, non dans le reniement des
spécificités nationales.
Nul doute que l'amitié franco-britannique soit dès lors appelée à être l'un des
pivots de cette Europe réconciliée, pacifiée et unifiée. Depuis l'entrée du
Royaume-Uni dans le marché commun, il y a maintenant trois décennies,
remarquable est le chemin parcouru dans le rapprochement de nos deux peuples et
de nos deux pays et dans le développement de notre coopération, à l'image de nos
actions communes en Afrique ou dans le domaine de la défense. Après bien
d'autres projets réalisés ensemble, peut-on trouver meilleur symbole de notre
capacité à coopérer que le Tunnel sous la Manche, par lequel Votre Majesté
arrivait hier dans la capitale française ?
Il y a quelques années je crois, Votre Majesté observait avec humour que "S'il
est vrai que nous ne conduisons pas du même côté de la route, il est tout aussi
vrai que nous avançons dans la même direction".
Convaincus que ce qui les unit est plus important que ce qui les sépare, c'est
vers l'avenir que la France et le Royaume-Uni veulent regarder ensemble.
Tel est bien le vœu que les Députés français souhaitent exprimer en ce jour
anniversaire, de concert avec leurs confrères de la Chambre des Communes qui ont
bien voulu faire le déplacement de Paris en cette heureuse occasion et dont je
salue la présence à cette réception.
Vive le Royaume-Uni !
Vive la France !
Vive l'amitié franco-britannique !
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