L’avènement de « systèmes d’armes de rupture » démontre, comme le dit l’amiral Christian Girard, que « le contrôle des espaces sous-marins et du fond des mers, détermine la supériorité stratégique mondiale ».
par le vice-amiral Christian Girard (2s) — Toulon, le 17 janvier 2023 —
Sommaire
Entrée en service du drone torpille nucléaire russe Poseidon
La Russie annonce la production industrielle de cette arme nouvelle. Son projet et son développement étaient connus. Elle faisait partie de la liste des armements de supériorité stratégique russe qui a été présentée par Vladimir Poutine en 2018.
Le Poseidon introduit une rupture dans le jeu global de la dissuasion nucléaire
C’est une arme de taille et des caractéristiques exceptionnelles pour une torpille (20 fois la taille d’une torpille habituelle et des performances opérationnelles affichées sans équivalent, propulsion et charge explosive nucléaires).[1]
Elle introduit une rupture dans le jeu global de la dissuasion nucléaire. Indépendamment de ses caractéristiques techniques et de ses performances, qui restent à démontrer, il faut constater que cette arme n’est pas destructible avec les moyens existants aujourd’hui. Elle ne peut être détectée et engagée comme peuvent l’être les missiles balistiques intercontinentaux par les radars et les missiles spatiaux et terrestres. Elle constitue donc un nouveau moyen dans le grand jeu de la dissuasion nucléaire au service des Russes.[2]

Mais cette arme ne vaudra que par les moyens qui assurent sa mise en œuvre. Une nouvelle catégorie de sous-marins est en train d’apparaitre dans la classe des sous-marins lanceurs d’engins. Ce sont les sous-marins de la classe Khabarovsk, dans laquelle les engins ne sont plus des missiles balistiques mais des drones torpilles.[3]



Cette arrivée relance la question de l’importance stratégique primordiale de la lutte sous la mer dans les rapports de force géostratégiques.

Le contrôle des espaces sous-marins, et du fond des mers, détermine la supériorité stratégique mondiale.
Il est essentiel pour sécuriser le transport des forces et des richesses, l’exploitation des ressources sous-marines, les oléoducs et gazoducs, et maintenant pour la survie des câbles sous-marins essentiels pour le fonctionnement du réseau internet mondial.
La Russie se dote de nouvelles armes apocalyptiques
La Russie se dote donc avec ces nouveaux moyens de la capacité de jouer une nouvelle fois le rôle du perturbateur dans le grand affrontement avec l’Occident.[4] Cela traduit son hostilité à l’égard, mais d’abord sa peur, de l’Occident.
Christian Girard
[1] Propulsion par un réacteur nucléaire, ogive thermonucléaire de puissance entre 2 et 100 mégatonnes, autonomie jusqu’à 5000 milles marins, vitesse entre 20 et 200 nœud grâce à la super cavitation, intervention jusqu’à 1000m de profondeur. Voir également : « L’illusion de la disparition de la menace à l’est du continent qui s’était répandue à la chute de l’URSS s’est dissipée. Le danger russe est actuel« : cf. Émission de LCI du 17.1.0223. Voir « Ukraine : leçons partielles pour avant, pendant et après la guerre » par le vice-amiral Christian Girard (2s) (2022-12-30).
[2] « Un docteur Folamour au Kremlin ? » par Françoise Thom in DeskRussie (2021-08-21).
[3] Voir « Russia’s Newest Submarine, Khabarovsk, Could Redefine Underwater Warfare« , in Forbes par H.I. Sutton (2020-06-09)
[4] Dans son dernier livre Cailloux stratégiques, publié en 2022, l’amiral Girard rappelle « divers invariants géopolitiques mésestimés, comme la prévalence du grand affrontement entre les puissances maritimes, États-Unis et leurs alliés européens, face aux puissances continentales, aujourd’hui représentées par la Chine et la Russie ».


Analyses de l’amiral Christian Girard (2s) :
- « Quelle stratégie face aux États-Unis ? » — Amiral Christian Girard (2s) — (2025-0322) —
- « Une initiative des démocraties libérales face à la nouvelle situation géopolitique » — Amiral Christian Girard (2s) — (2025-0310) —
- « Début 2025, la véritable fin du concept d’Occident ? » — Amiral Christian Girard (2s) — (2025-0216) —
- « Point de situation de la La guerre d’Ukraine » — Amiral Christian Girard (2s) — (2024-1125) —
- « Percée vers Koursk : une nouvelle stratégie ? » — Amiral Christian Girard (2s) — (2024-0902) —
- « Le croisement des guerres » — Amiral Christian Girard (2s) — (2024-0422) —
- « Deux questions politico-stratégiques pour le XXIe siècle » — Amiral Christian Girard (2s) — (2024-0309) —
- « Ukraine : rupture ou continuité ? » — Amiral Christian Girard (2s) — (2024-0309) —
- « L’amiral Alfred Thayer Mahan, le Clausewitz américain » — Amiral Christian Girard (2s) — (2024-0110) —
- « Vilnius : jeu de rôles, contradictions, myopie ou hypocrisie ? » — Amiral Christian Girard (2s) — (2023-0713) —
- « Réflexions sur le cyber dans l’espace aéroterrestre en Ukraine » — Amiral Christian Girard (2s) — (2023-0224) —
- « Vers l’émancipation de la stratégie ukrainienne » — Amiral Christian Girard (2s) — (2023-0603) —
- « Relation et antisymétrie entre les situations de l’Ukraine et de Taïwan » — Amiral Christian Girard (2s) — (2023-0422) —
- « Quelle stratégie occidentale en Ukraine ? » — Amiral Christian Girard (2s) — (2023-0207) —
- « Torpille nucléaire Poséidon » — Amiral Christian Girard (2s) — (2023-0117) —
- « Point stratégique sur la guerre en Ukraine fin 2022 » — Amiral Christian Girard (2s) — (2022-1220) —
- « Ukraine : Leçons partielles pour avant, pendant et après la guerre » — Amiral Christian Girard (2s) — (2022-1230) —
- « Ukraine : une guerre de la fin de l’Histoire » — Amiral Christian Girard (2s) in Revue de Défense Nationale (RDN) — (2022-1001) —
- « Une analyse géopolitique de la guerre en Ukraine » — Amiral Christian Girard (2s) — (2022-0602) —
Voir également :
- « Hommage au VAE Guy Labouérie : incertitude et foudroyance » — Marine Nationale (2019-04-16) —
- « Témoignages sur l’amiral Labouérie par le vice-amiral Christian Girard et les généraux d’armée Claude Coulon (Terre) et François Mermet (Air) in European-Security (2016-04-19) —